14 petites filles ont rejoint l’orphelinat, elles ont entre 4 et 7 ans. Pour la plupart, il s’agit de petites filles de devadasis, autrement dit de prostituées sacrées (intouchables). La plupart de leurs mamans sont soit en phase terminale du sida, soit déjà décédées. Les quelques filles qui ne sont pas de familles de devadasis ont des histoires plus que lourdes : la maman est morte, le papa alcoolique qui ne travaille pas envoie la fille de 4 ans mendier autour des maisons entre 6h et 9h du matin, puis autour de l’arrêt de bus pour qu’il ait à manger et qu’il puisse se soûler… Il s’apprêtait à la violer quand des travailleurs sociaux du village sont intervenus, pour aboutir à un accord de sa part pour qu’elle séjourne dans l’orphelinat. Une autre passait ses journées à ramasser les légumes pourris jetés par terre sur la place du marché pour avoir de quoi faire la cuisine pour sa grand-mère et elle-même. Après check-up, il est certain aujourd’hui qu’aucune des petites filles n’a le sida (condition d‘admission à l‘orphelinat), et aucune n’a été violée.
D’une façon générale, la situation des femmes, et des fillettes est assez difficile en Inde, même s’il ne faut pas toujours sombrer dans les clichés. Toute personne qui a visité l’Inde a pu voir que les femmes étaient présentes dans l’espace public, elles ont investi le marché du travail, et les hauts niveaux de la vie politique. Toutefois, il n’en demeure pas moins, qu’une grande partie des femmes indiennes souffrent de discrimination à tous les niveaux, et ceci avant même leur naissance. D’après le dernier recensement (2001), les femmes ne constituent que 48% de la population indienne, ce qui est une anomalie démographique importante. Ceci est en partie dû au fait du phénomène du ‘foeticide’, c'est-à-dire la sélection des embryons males. La volonté d’avoir des fils est liée à de nombreux facteurs, tout d’abord, religieusement, il est nécessaire pour les hindous d’avoir un fils, car c’est lui qui doit allumer le bucher funéraire. Ensuite, les filles quittent la maison pour rejoindre la famille de leur époux, elles ne sont que des ‘invitées’ dans leur famille, et ne participeront pas (du moins dans la conscience collective) aux revenus du foyer, elles seront au contraire un coût, au travers du phénomène de la dot (don d’argent de la famille de la mariée vers celle du marié lors du mariage). Toutes ces raisons font que les parents préfèrent avoir un fils, et s’ils ne sélectionnent pas les embryons, les études montrent que les dépenses de santé sont moindres pour les fillettes, de même que leur taux de scolarisation.
Ceci explique pourquoi Prema a choisi de se focaliser sur les fillettes, à la fois parce qu’elles courent plus de danger en tant que filles de devadasis (notamment risques d’être prostituées), mais aussi parce que d’une façon générale, les petites filles indiennes partent avec moins de chance dans la vie. Ceci ne veut pas dire que la vie soit facile pour les jeunes garçons de ces milieux, mais Prema avait conscience que la mixité risquait de poser des problèmes d’ici quelques années (quand les enfants deviendront adolescents), à la fois à l’intérieur de l’orphelinat (les cas de harcèlements sexuels d’écolières par leurs camarades de classe ne sont malheureusement pas rares), mais aussi vis-à-vis de la pression sociale de l’extérieur, le statut social de ces fillettes étant déjà, en dépit de leur jeune âge, compromis.
Pour plus d’informations sur les filles en Inde :
Unicef :
http://www.unicef.org/india/media_3285.htm
Le site du recensement indien : http://www.censusindia.gov.in/Census_And_You/gender_composition.aspx
La Banque Mondiale :
http://www.worldbank.org.in/WBSITE/EXTERNAL/COUNTRIES/SOUTHASIAEXT/INDIAEXTN/0,,contentMDK:21476335~pagePK:141137~piPK:141127~theSitePK:295584,00.html
English version (abbreviated)
Fourteen little girls, between the ages of 4 and 7, have been admitted to the orphanage. For the most part, they are daughters of devadasis, otherwise called “sacred prostitutes,” untouchable women who are either in the terminal stages of AIDS, or already deceased. (N.B. A pre-admission medical examination guarantees that no child in the orphanage has AIDS, and to date, none of them have been raped.)The girls whose mothers are not devadasis, have come from other problematic backgrounds. One child’s mother is deceased, and the father, alcoholic and unemployed. He was sending his four-year old daughter to beg for money in the village between 6 and 9 in the morning to buy food and… alcohol. He was in the verge of raping her when the village social workers intervened, and convinced him to let her go to the orphanage. Another child, whose mother is also deceased, spent her days foraging for vegetables left on the ground from the village market, in order to feed herself and her grandmother.
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